Les premiers symptômes ont commencé à pointer le bout de leur nez plusieurs semaines avant le diagnostic. En général, j’ai une mémoire de poisson rouge. Pourtant, je me souviens d’une chose comme si c’était hier : la douleur.
Le souvenir d’une souffrance si forte que j’en tombais dans les pommes. Je me rappelle avoir pleuré pour la première fois de ma vie à cause de la douleur. Je garde encore les images de ces nuits blanches, accrochée à mon ventre et pliée en deux, attendant que ça passe. Une douleur tellement vaste que je ne savais plus la situer. Au début, ça a commencé dans le ventre, puis au niveau du nombril. Le mal se répandait davantage. Mal au ventre, mal au dos… Tout mon centre brûlait de douleur.
Premier diagnostic
Helicobacter ! Une bactérie qui provoque une inflammation de l’estomac déclenchant une gastrite, par exemple. La douleur se déclenche spontanément, sans raison. Quand je suis allée voir le médecin après des semaines de douleurs (oui, je suis plutôt du genre à attendre que ça passe), je n’avais plus mal au ventre et je ne savais plus où situer la douleur. Avec ces informations et des antécédents d’helicobacter, la conclusion du gastro a été plutôt rapide. Esomeprazol pendant deux semaines. Je suis donc rentrée chez moi avec une ordonnance gardant le sentiment que quelque chose n’allait pas.
Le lendemain, la douleur revient, de plus en plus forte. Elle est différente de celle ressentie quand j’avais fait un helicobacter. Au fond de moi, je reste persuadée que ce n’est pas ça.
Encore une nuit blanche et debout à 7h pour aller travailler. Je n’ai aucune force, je suis incapable de manger quoi que ce soit et je souffre. Quand je sens la douleur arriver, je fonce aux toilettes pour être sûre de ne pas pleurer devant mes collègues. Ce soir-là, j’avais invité ma mère et mes sœurs à dîner. Malheureusement j’ai dû leur commander à manger pendant que je me tordais de douleur sur le canapé.
J’ai alors demandé à ma mère de m’emmener chez SOS médecins tout de suite. Of course, une fois chez le médecin pas de douleur. Je reste incapable de situer les zones où j’ai mal… Cette fois-ci, on me prescrit une prise de sang.
L’enfer aux urgences
Le lendemain, je me rends au laboratoire d’analyses sanguines à 7h, avant d’aller travailler, dans un état minable. Je n’ai pas dormi et n’ai presque rien mangé depuis trois jours. Je suis épuisée physiquement, mentalement et émotionnellement.
L’après midi, je reçois un appel qui me dit de foncer aux urgences tout de suite parce que ma CRP (indice d’inflammation) est à 156 (au lieu de 5 maximum).
Aux urgences, je ne suis pas tout de suite prise en charge. Mes parents et tous les médecins sont là. S’ensuit une série de nouvelles analyses. 39,5 de température, perfusions. On me dit que je vais passer la nuit à l’hôpital, et que je pourrais peut-être sortir le lendemain.
Je suis restée une semaine !
Poker face…
J’étais installée dans une chambre avec une dame hospitalisée pour maladie de Crohn, et qui a passé la nuit a avoir des diarrhées, sans pouvoir se lever. Difficile de fermer l’œil dans ce cas. Une fois ma CRP descendue pendant plusieurs jours, j’ai eu le droit à un défilé de médecins, et à une série d’examens… Le parcours du combattant avant le terrible moviprep et la coloscopie.
Iléite terminale
Mon intestin s’est auto-consumé. D’après ce que j’ai compris, j’ai même eu le droit à des photos de mon intestin scarifié. Maintenant je comprends mieux pourquoi je suis tombée dans les pommes à cause de la douleur.
Je ne me souviens pas du moment où on m’a annoncé que j’avais la maladie de Crohn. Je me souviens juste de ce sentiment de soulagement. Enfin la douleur allait s’arrêter.
Et après ?
Je suis donc restée une dizaine de jours à l’hôpital. J’ai partagé ma chambre avec quelques personnes atteintes de la même maladie, ce qui m’a donné un aperçu très sombre des potentielles conséquences auxquelles je devrai faire face.
Au bout de quelques jours, je suis contente de rentrer chez moi, munie d’une longue liste de médicaments et de documentations. Et j’oublie vite cet épisode douloureux pour me concentrer sur ma nouvelle vie.